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Surf loose report

Chroniques de la loose surfistique ordinaire

Session de merde

La guérite, 13h45.

Quoi? C'est tout? J'aurais pourtant juré qu'il était au moins 15h, vu comme je suis tout cassé et j'en ai plein les gonades de cette session de merde.

Déjà, en arrivant sur le spot à midi pétantes, il avait fallu essuyer une première déception. Le vent avait tourné plus tôt que prévu et était en plein dedans depuis une bonne demi-heure. Ce qui avait peut-être été des conditions potables une heure plus tôt commençait franchement à devenir vilain. Et parce qu'il fallait bien que ça soit la faute de quelqu'un, j'accusais aussitôt la vioque qui avait hésité à s'insérer dans le rond-point à la sortie du taf, et à cause de qui j'avais perdu deux bonnes minutes à poireauter. Pour mon collègue que j'avais retrouvé sur place, c'était tout vu: "je vais vérifier un peu plus loin, et si ça ne marche pas mieux, je rentre chez moi". Rétrospectivement, c'est lui qui avait raison.

La session n'avait pourtant pas trop mal commencé. Grâce à Linette, le passage de la barre n'avait été qu'une simple formalité, et je n'avais eu à attendre qu'un petit quart d'heure pour prendre ma première vague: Un monstroplante parti pour dérouler à droite, et qui a eu la gentillesse de me laisser le temps de poser un roller avant de m'envoyer par le fond. Et puis le spot a commencé à se vider des derniers acharnés venus tenter leur chance à mesure que la houle était de plus en plus saccagée par le vent forcissant. En quelques minutes, il ne restait plus que moi, un surfiste et un SUP à braver les éléments.

Parce qu'il fallait être brave, et sans doute aussi un peu con, pour continuer à insister au milieu de ce plasma informe d'eau et d'écume. Des vagues à deux étages, parfois trois, incroyablement molles et pourtant largement plus hautes que moi. Des pentes trop poussives pour être exploitables, jusqu'au moment où la masse liquide en suspension à son sommet décidait de dévaler la pente en une avalanche meurtrière de mousse balayant tout sur son passage. Des circonstances dans lesquelles la différence entre une vague ratée, faute de puissance, et la noyade ne tient qu'à une dizaine de centimètres trop à droite ou trop à gauche. Un setup idéal pour se payer une petite glisse moisie tous les quarts d'heure... Et je suis généreux!

Peu de temps après le départ du dernier autre surfeur, qui avait finalement eu l'intelligence de ne pas insister, j'avais néanmoins réussi à placer un drop improbable. Ramant avec la force du désespoir sur une vague qui ne cessait de perdre en puissance, celle-ci se mit soudain à se reformer et à creuser d'une manière inquiétante. Trop heureux de sentir enfin une poussée jouer en ma faveur, je m'étais précipité sur mon flotteur dans l'espoir de profiter de quelques secondes de glisse. Ce n'est qu'une fois debout que je réalisais qu'il aurait sans doute été plus sage de refuser cette vague. Devisant l'eau située en contrebas, à une distance à peu près équivalente à ma propre taille, j'ai senti la lèvre me projeter vers l'avant. Les fesses serrées dans l'espoir que le rocker de Linette allait m'éviter le plantage à l'arrivée, j'ai pu profiter de ce bref moment d'éternité en apesanteur pour méditer sur le sens de la vie. Par miracle, je m'en sortais indemne après un atterrissage plutôt musclé mais parfaitement contrôlé, et un long tout droit destiné à m'éviter la double baffe sur le point de m'encercler.

C'est à peu près à ce moment là que la session était définitivement partie en couille. Tentant de réitérer le coup du drop de l'extrême (à défaut de pouvoir espérer prendre une vague "normalement") sur une gauche en train de péter, je me suis bouffé la lèvre en pleine face au moment du bottom, ce qui s'est traduit par une énorme raclée. Le genre qui m'a maintenu sous l'eau pendant une bonne dizaine de secondes. Désarticulé comme un pantin, évitant tout effort musculaire pour économiser mon oxygène, je me demandais alors si ce n'était pas là la pire session de ma vie. La réponse n'était peut être pas positive, mais le simple fait que la question soit posée en disait long sur la situation.

Après avoir renoué avec mes habitudes aérobies, j'allais enchaîner non stop les peignées plus ou moins sévères. Entre les vagues qui refusaient que je les refuse et tentaient de m'assommer en m'explosant sur le dos, et les take-off acharnés qui se terminaient soit sous l'eau, soit dans une position merdique m'interdisant toute prise de carre, je passais l'heure qui suivit à m'épuiser pour ne rien accomplir, à me faire baratter comme une motte de beurre rance. Pire, rabattu sous la barre par une mauvaise série de chutes, et dérivant sans m'en rendre compte vers le sud, je me retrouvai à devoir enchaîner les canards au milieu d'une épaisse soupe d'algues, tout ça pour satisfaire cette obstination débile à vouloir prendre une dernière vague potable avant de rentrer. Le SUP qui me tenait compagnie avait depuis longtemps plié bagages. Le mec n'a même pas essayé de rentrer en glissant. Allongé sur sa planche, la pagaie coincée sous le ventre, il avait ramé jusqu'à la plage.

C'était donc à présent un fait avéré, j'étais le seul con à m'acharner. Après avoir repassé la barre à l'issue d'un effort aussi absurde qu'intense, je me retrouvais à mendier les mousses comme un clodo à un feu rouge dans l'espoir de rejoindre la plage debout. Je n'avais pu m'échapper de cet état qu'à la faveur d'une courte gauche méritant péniblement le titre de "potable", mais assez consistante pour me permettre d'atteindre le bord dans une posture verticale.

Je suis à présent au cul du camion, avec de la vaisselle cassée à la place du squelette et un profond sentiment de dégoût vis à vis des conditions et de ma propre obstination. C'était une bonne grosse session de merde. Le genre que si on me laissait le choix entre ça et une torsion testiculaire, j'hésiterais franchement avant de répondre. Bref, le bilan de cette journée, c'est que j'ai définitivement besoin d'un break.

On en recausera le jour où il y aura des vagues potables.

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A
Pour résumer on te voit jeudi aux crevettes quoi ;-) ;-) :-)
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U
Ouais, session pas top aujourd'hui. Mais au moins il y avait moyen de glisser, et je ne me suis pas fait défoncer la tronche. Dans les circonstances actuelles, le bilan est plutôt positif.
C
Session un peu moins pourrie que samedi effectivement, mais c'était pas l'extase, très mou fermant double marches style monstroplante.
U
Quoiquoiquoi? Il y a un coup à jouer jeudi???<br /> <br /> Dur! J'ai quand même bien besoin d'une pause. Les épaules et le coude commencent à tirer fort.
D
c'est que j'ai définitivement besoin d'un break.<br /> On en recausera le jour où il y aura des vagues potables.<br /> <br /> Il y a des jours où t'es content d'avoir du travail et une famille pour t'occuper l'esprit afin de laisser cette addiction de côté... Bref je fais un tour sur météo consulte histoire d'être sûr !
Répondre
U
Je comprends pas... J'ai un travail et une famille... Pourquoi je ne pense qu'à ça???