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Surf loose report

Chroniques de la loose surfistique ordinaire

Friends will be friends

Ailleurs qu'aux crevettes, 12h.

"Oh la la, encore une chanson de Queen!" Si c'est ce que vous vous êtes dit en lisant le titre de cet article, félicitations! Soit vous avez vécu l'âge d'or du Rock n' Roll, soit vous avez une excellente culture musicale. Dans les deux cas, cher lecteur, vous êtes dignes de lire ma prose et de venir grossir les rangs de mes fans hystériques (surtout si vous êtes blonde à forte poitrine). Sinon... Bon, je suis grand prince, je vous autorise quand même à lire ma prose et à venir grossir les rangs de mes fans hystériques (surtout si vous êtes blonde à forte poitrine, permettez-moi d'insister).

Mais venons-en aux faits: Le choix du spot n'avait pas été simple. En combinant mes expériences de la semaine et les prévisions du jour, il me semblait évident que la plupart des classiques seraient en chantier. En plus, mon pote moustachu avec qui j'avais prévu d'aller à l'eau souffre encore d'un mal de dos chronique et n'avait pas particulièrement envie d'aller affronter des tubes de 2m ni une barre longue comme un terrain de foot.

Il avait donc fallu sélectionner avec parcimonie (c'est le nom d'une copine qui bosse chez météo-France) un endroit captant raisonnablement cette houle puissante venue de l'atlantique et dotée d'une période honorable de 16 secondes, tout en restant à l'abri du vent tournant sud-est sur le milieu de la session. Après une analyse approfondie des différents éléments mis à ma disposition, je me décidais pour un coin légèrement éloigné mais bien protégé, et bénéficiant des effets filtrants de la diffraction créée par les îles. Le genre de spot qui ne marche pas tous les jours mais qui peut être sympa sur un bon alignement de planètes.

Le rendez-vous est fixé sur l'aire de covoiturage de Pluneret, nous profiterons de mon tout nouveau bus scolaire pour faire la route ensemble et tailler la bavette en chemin au lieu de se la jouer "convoi de gouffres à gasoil". Bon sang, ça fait toujours plaisir de retrouver les copains! Surfer avec mes potes, c'est l'une des motivations qui m'a poussé vers le surf. "Une session entre amis, c'est un bon moment garanti™" (cette phrase ferait un excellent slogan publicitaire!), et cela même si la session en question se résume à faire trempette sur un lac en causant chiffon.

Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, mon passager m'apprend qu'un pote supplémentaire nous rejoindra sur place. Ô joie! Le gang des nazes est reformé au grand complet, trois lascars unis comme les doigts de la patte de goéland: on va pouvoir envoyer du gros... du gros plant dans les camionnettes.

Le "spot" que nous visons est très large et possède de multiples accès pour checker. Plus nous poussons loin et plus les vagues diminuent en taille. En quelques minutes, nous trouvons notre pointure idéale: pas trop gros pour mon grand blessé, pas trop petit pour ma Cymatic. Le temps d'enfiler nos tenues d'homme grenouille (ça pince quand même sévère aujourd'hui, avec ce vent d'est) et nous nous jetons à l'eau.

A peine la barre laissée derrière nous, j'aperçois notre guest star en haut de la dune. A cette distance, difficile de reconnaître formellement sa silhouette, mais le fait qu'il agite les bras en réponse à nos saluts est un signe encourageant. Il faudrait en effet vraiment être con pour faire coucou à des inconnus. (D'ailleurs, je le fais tout le temps quand je checke, juste pour le plaisir de faire croire aux mecs à l'eau qu'un de leurs potes vient d'arriver.)

Le temps qu'il se change et nous rejoigne, je capte mes premières vagues. Ce n'est pas la session de l'année mais ça glisse, et j'ai le loisir de placer quelques longs virages avant de me faire tacler par la mousse ou de sortir sur le mou. Pile au moment où je vois le nouvel arrivant se mettre à l'eau, j'accroche une superbe droite qui ne cesse de rouvrir et m'offre plusieurs opportunités de rollers backside. Avec un peu de chance, il m'aura vu pendant qu'il ramait...

Entre bros, on ne se dit jamais "wahou" quand l'autre a pris une belle vague, on est trop pudiques pour ça. Mais ça fait toujours plaisir de savoir qu'on a un public de connaisseurs quand on réussit quelque chose dont on est fier. Peut-être même qu'un jour, lors d'une soirée chaleureuse où nos esprits embués par des boissons de qualité y seront disposés, tel ou tel "exploit" refera surface, embelli par l'imperfection de notre mémoire et le plaisir d'être ensemble.

Au large, mon moustachu est toujours en attente. Il est placé haut, mais je comprends sa volonté légitime de ne pas prendre le risque de ramasser série sur série, vu son état de santé. Par contre, c'est à peu près clair qu'il ne captera pas autant qu'ici. Choix difficile! J'aimerais lui donner quelques-unes des vagues sur lesquelles je me régale, mais c'est impossible.

Le blondinet nous rejoint enfin. Commence alors un savant mélange de causeries grossièrement entrecoupées de "excuse, je prends celle-là" (faut pas déconner, la vague reste la priorité absolue, même entre potes). On cause de tout et de rien, on fait les comptes des taxes criminelles qu'on se doit les uns aux autres, on se raconte les sessions auxquelles l'un de nous n'était pas, on rigole et on surfe...

...enfin, pour l'instant j'ai surtout l'impression que c'est moi qui surfe. Sans doute ma vision est elles biaisée par le fait que, pendant que je suis sur la vague, je ne regarde pas ce que font les copains, mais lorsque j'ai le loisir de les observer (en gros quand je remonte au peak chercher la rampe suivante), je les vois beaucoup ramer et moins surfer. Difficile de dire pourquoi ça ne fonctionne pas pour eux aussi bien que pour moi: ils n'ont pas les mêmes planches, pas le même gabarit, je ne peux évidemment pas me mettre à leur place. Mais ce qui est certain, c'est que, quelque part, ça gâche un peu mon plaisir de savoir que tout le monde ne profite pas du buffet à volonté.

Évidemment, je ne laisse rien transparaître (encore cette pudeur masculine), je chambre même (toujours cette pud... ah non tiens, là c'est juste que je suis un gros connard). Mais au plus profond de moi, je ne suis pas satisfait de cette situation. Déjà, d'un point de vue purement égoïste, ça ne m'est pas profitable, c'est mathématique: s'ils ne s'amusent pas, ils ne voudront pas revenir. S'ils ne reviennent pas, je recommence à surfer tout seul. Si je recommence à surfer tout seul, il n'y a plus personne pour me servir de faire-valoir... Mais plus sérieusement, s'il y a de rares personnes en présence desquelles je suis capable d'altruisme (voir même, soyons fous, d'empathie) ces deux gonzes en font partie. Et ça me fait chier d'imaginer qu'ils puissent se faire chier.

Mais que faire? Prodiguer conseils et encouragements? Sans déconner?! C'est moi le rookie de la bande, ils surfaient déjà bien avant que je ne porte des bouchons d'oreille. Ce serait prétentieux et idiot d'oser croire que je puisse être d'une aide quelconque dans ce domaine. Et pourquoi pas faire du coaching en enfilage de suppositoire pendant qu'on y est? (Cela dit, une étude récente a démontré que 70% des gens mettaient leur suppositoire dans le mauvais sens, ce qui ouvre des perspectives de carrière inattendues dans ce domaine). Bref, le mieux est encore de ne pas bouder mon plaisir et d'espérer qu'ils prennent rapidement le leur.

Or, comme la vie fait bien les choses, cette session s'apprête à nous offrir un souvenir mémorable à partager à trois. Alors que nous nous faisons causette entre deux séries (rayez le mot en trop dans cette phrase), une ligne nous fonce droit dessus. Le bazar est du genre à fermer, mais il est aussi tellement large qu'il est à peu près évident que nous allons tous pouvoir partir dessus sans effort malgré la distance qui nous sépare. Après un take-off collégial, nous virons à droite comme un seul homme, sans même avoir eu besoin de prononcer un mot. Étant le plus à gauche (ce qui est souvent pratique quand on privilégie les gauches et qu'on ne veut pas foncer dans ses potes), j'ai tout le loisir de profiter du spectacle de mes deux acolytes évoluant frontside sur cette pente. Fermeture du magasin oblige, nous nous faisons tous trois ramasser à peu près au même moment, non sans nous être jetés un dernier regard complice signifiant "on se retrouve après la noyade".

Ces instants rares et partagés? Priceless! Pour tout le reste, il y a eurocard-mastercard.

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M
Bientôt, une serie Breizh Surfeur Journal!
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U
Ha ha :-D<br /> <br /> Ce serait chouette mais ce blog me demande déjà beaucoup d'énergie. Dans un premier temps, je vais essayer de tenir le rythme jusqu'en 2019, après on avisera.<br /> En publiant moins souvent, je pourrais avoir du temps pour faire quelques illustrations, ou même changer complètement de format/support/media, qui sait ?
J
c'est bien écrit, c'est sympa, c'est pile ce qu'il faut pour compléter un report, je suis conquis
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U
Merci !
C
Merci, des barres sur le "on se retrouve apres la noyade" priceless ui ui.
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